Sur les traces de Hooker et Lyall à l’île Campbell
Il est difficile de ne pas tomber sous le charme des paysages et de la faune de l’île Campbell… Mais en y regardant de plus près, le spectacle offert par la flore est tout aussi attrayant, voire inattendu, et plus particulièrement celui de larges plantes nommées « mégaherbes ». Comme leur nom l’indique, les mégaherbes surprennent par la hauteur de leurs tiges, la largeur de leurs feuilles, le diamètre de leurs fleurs, mais aussi leurs couleurs. Ces bien nommées semblent en effet toutes droit sorties d’une autre dimension au regard du reste de la flore de l’île, en particulier des autres plantes à fleurs présentes à cette latitude (52°Sud).
Au cours d’une expédition britannique dirigée au XIXème siècle par James Clark Ross, Joseph Dalton Hooker est en charge des collections botaniques. Avant de découvrir la mer de Ross en janvier 1841, l’Erebus et le Terror font une courte escale à l’île Campbell. En l’espace de quatre jours seulement, le botaniste collecte pas moins de deux cents espèces de plantes. Pour cette expédition dans l’océan Austral, l’Amirauté britannique avait fourni à Joseph Hooker seulement deux boites de collections et vingt-deux ramettes de papier pour sécher les plantes ; rien de plus ! C’est son père, William Hooker éminent botaniste en son temps et notamment directeur des Jardins botaniques royaux de Kew, qui paya lui-même les vêtements, microscopes et livres nécessaires à son fils pour accompagner l’expédition. Dans cette lourde tâche d’établir les collections de plantes lors des escales, Hooker travaille de concert avec l’assistant botaniste David Lyall, dont un col et un sommet portent aujourd’hui le nom sur l’île Campbell.
Hooker publie en 1844 « The botany of the Antarctic Voyage » ouvrage en plusieurs volumes dans lesquel il nomme et décrit pour la première fois le genre Pleurophyllum, dont la racine grecque signifie « feuille nervurée ». Ces mégaherbes de la famille des Astéracés comprennent trois espèces, toutes présentes sur l’île Campbell : Pleurophyllum criniferum, Pleurophyllum hookeri et Pleurophyllum speciosum. Cette dernière est sans doute la plus spectaculaire avec ses larges fleurs violettes en forme de marguerite ! Sa floraison maximale intervient aux mois de janvier et février, lorsque que la plante arbore ses fleurs sur les hauteurs de l’île. Ce sont alors de véritables champs colorés qui s’offrent aux yeux des visiteurs. Bien souvent les autres espèces de pleurophyllum se mêlent aussi aux champs de speciosum. On trouve d’ailleurs des cas d’hybridation entre speciosum et ses cousines.
Parmi les mégaherbes il faut également citer le lys de Ross, Bulbinella rossii, ainsi que la carotte de l’île Campbell, Anisotome latifolia, elles aussi décrites par Joseph Hooker.
« Probablement aucun groupe d’îles à la surface du globe, de même étendue limitée et si parfaitement isolé, ne peut se vanter… de si belles plantes… Il est tout naturel que la grande taille et la luxuriance de ces plantes des hautes latitudes excite la surprise. »
Joseph Hooker
Notons enfin que les enchevêtrements des larges feuilles de ces mégaherbes forment un habitat propice pour plusieurs espèces d’oiseaux, dont la bécassine et le pipit, tous deux habitants endémiques de l’île Campbell.
« Une espèce extrêmement belle et très voyante avec de grandes et abondantes fleurs pourpres, des tiges de 2 à 3 pieds de haut et des feuilles radicales amples, ressemblant à celles de Plantago major, mais beaucoup plus grosses, fortement nervurées de gros nerfs parallèles solides. »
Joseph Hooker à propos de Pleurophyllum speciosum
« Mes remerciements vont également au Dr. Joseph D. Hooker et Mr. Lyall, dont les efforts incessants dans le département botanique ont permis d’ajouter plusieurs milliers de nouveaux genres et d’espèces aux catalogues de la flore australe. »
James Clark Ross
Laisser un commentaire
Rejoindre la discussion?N’hésitez pas à contribuer !