La Géorgie du Sud et ses rats

Dans mon article précédent, j’évoquais cette période sombre de la Géorgie du Sud avec dans un premier temps la chasse aux phoques, puis celle des baleines. Ces chasses ont non seulement eu pour conséquence la quasi disparition de certaines espèces de baleines, mais également l’introduction des rats de façon totalement involontaire. En effet, dès le début du vingtième siècle, ces rongeurs se sont peu à peu installés en Géorgie du Sud arrivant avec les bateaux, les hommes et le matériel. Bien évidemment, les rats se sont rapidement multipliés bénéficiant des restes de l’exploitation des baleines (graisse, peau, os…) mais également d’un habitat propice (logements des baleiniers, hangars, usines, eau douce, plantes riches en vitamines…).

Au milieu du vingtième siècle, les stations baleinières ferment une à une devant la raréfaction des prises. A partir de ce moment-là, les rats doivent trouver une nouvelle source d’alimentation ; ils s’éloignent peu à peu des quartiers occupés par les hommes pour se retrouver dans un milieu totalement différent. Ils arriveront finalement à s’y adapter grâce à la flore et la faune locale. En effet, cette végétation dense qu’est le tussock, leur fournit un habitat idéal, et en guise de nourriture, ils profitent des nombreux œufs et poussins d’oiseaux qui nichent dans des terriers ou au ras du sol, sans compter en plus, la présence d’eau douce. Leur développement se fait rapidement au détriment de certaines populations d’oiseaux qui elles décroissent. Les rats consomment également le tussock car ils y trouvent au cœur de la tige un apport en sucre conséquent. Cette problématique des rats se retrouvent également dans la plupart des iles sub-antarctiques (Kerguelen, Macquarie, Heard…) qui grâce à des opérations de dératisation commencent à recouvrer leur écosystème initial, mais les soucis posés par ces espèces invasives sont loin d’être réglés.

La première carte ci-dessous montre l’aire de répartition du rat noir en Géorgie du Sud et la seconde, celle du Pipit de Géorgie du Sud, un petit oiseau endémique de l’île qui niche lui aussi dans le tussock. On remarque facilement que ces deux aires ne se recoupent absolument pas, les rats étant répartis au Nord de l’île là où les stations baleinières étaient implantées, alors que le pipit auparavant présent aussi dans ces zones, se trouve maintenant localisé au sud ou sur des iles, hors de portée des rats. Mais pourquoi les rats se trouvent-ils au nord et le pipit au sud ? Et bien tout simplement par ce que la Géorgie du Sud est recouverte à 55% de glaciers notamment en son centre. Les rats sont parfaitement incapables de franchir ces glaciers pour passer sur la côte sud. Ils forment donc une barrière naturelle permettant au pipit mais également à d’autres oiseaux, de bénéficier de zones vierges de rats. Il est bien évident que si les glaciers venaient à reculer ou disparaitre, cette barrière s’estomperait permettant la colonisation par les rats de ces zones encore vierges. Le gouvernement britannique aidé par des donations, mène depuis quelques années des opérations de dératisations afin de tenter de limiter le développement des rats qui, une fois encore, payent les erreurs de l’homme.

Mise à jour de mai 2018 : 7 ans après le début du programme de dératisation de la Géorgie du Sud, le gouvernement a annoncé que l’île n’avait plus de rats. Opération réussie !

☞ LIRE AUSSI : l’île Macquarie sans lapins ni rats

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5 réponses
  1. sholby dit :

    Hello Samuel,

    Je suis avec attention, fascination, et une certaine pointe d’envie votre joli blog et je vous remercie de nous permettre de suivre un peu de vos voyages. Je ne peux m’empêcher de relever une petite erreur de rédaction amusante dans la dernière phrase de cette note : « des opérations de dératisations afin de tenter de limiter le développement des rats qui, une fois encore, payent les erreurs de l’homme ». En l’occurence, ce ne sont bien sûr pas les rats qui trinquent ! 😉

    Amicalement,

  2. Samuel dit :

    Je voulais dire par là, que l’homme règle de la manière forte ses propres erreurs et que les rats en font les frais, ce qui reste dommageable comme toute perte d’un être vivant ! Les rats trinquent, après en avoir fait trinquer à la Géorgie du Sud bien évidemment…

  3. sholby dit :

    Bon sang, mais c’est bien sûr, vu sous cet angle ! J’avoue que je n’avais pensé qu’au Pipit de Géorgie du Sud. Merci de la précision.

  4. Mariel dit :

    Merci pour votre site. Je découvre grace à lui un peu plus notre planète.
    J’écoutais M Rocard sur France Inter parler de la Géorgie du Sud où il fait en ce moment une « croisière » et je n’avais aucune idée d’où était située la Géorgie du Sud…
    Pour moi il n’y avait qu’une Géorgie. Enfin bref, juste pour vous remercier.
    Bons voyages !

  5. JAKEZ dit :

    Bonjour,

    J’étudie depuis 20 ans la biologie du Pipit maritime (Anthus patrosus petrosus) en Bretagne et prépare actuellement un article sur la dispersion de reproduction. En cherchant des éléments comparatifs, je suis arrivé sur votre site en cherchant des renseignements sur Anthus antarticus dont la distribution sur le trait de côte est similaire à cette de Anthus petrosus petrosus en Bretagne. Le problème des rats est identique sur les côtes bretonnes mais pas de glaciers pour séparer ces deux espèces !! J’aimerais pouvoir me procurer les deux cartes de votre article, pourriez-vous me les transmettre ainsi que les références exactes de votre article.

    Cordialement

    Jacques Garoche

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